Il est une heure et quart. Il ne reste plus que deux heure quarante cinq à vivre au narrateur. Il est pris de violents maux de tête et de douleurs physiques insoutenables.
D’après les rumeurs, personne ne souffre sous la guillotine. Mais le narrateur se demande qui a pu témoigner d’une telle chose, dans la mesure où aucun guillotiné n’a pu revenir donner son ressenti. La pensée de son exécution fait encore plus souffrir le condamné.
Le narrateur se laisse de nouveau envahir par l’espoir d’une grâce accordée par le roi Charles X. Le condamné traverse des états émotionnels très différents en peu de temps.
Le narrateur décide d’affronter la mort avec courage. Il imagine à quoi peut ressembler la vie après la mort. Il imagine aussi que des morts seront présents pour assister à son exécution et qu’un démon assassinera son bourreau. Il songe à ce que son âme va devenir après sa mort. Il demande à voir un prêtre.
Le narrateur s’est endormi et a rêvé qu’il se trouvait en compagnie de ses amis. Il est réveillé par une vieille femme présente dans son rêve. On lui annonce la visite de sa fille.
Une fois devant lui, sa fille ne le reconnait pas. Cela fait maintenant un an qu’elle ne l’a pas vu. Le narrateur tente de lui faire comprendre qu’il est son père, mais cela fait trop longtemps qu’elle ne l’a pas vu. Il a le sentiment que plus rien ne le rattache à la vie désormais.
Pendant la dernière heure qui lui reste à vivre, le narrateur se replonge dans ses pensées. Il imagine les détails de son exécution : le bruit de la foule, les insultes, les gendarmes et la place de Grève.
Il imagine une foule insensible et avide de sang en train d’applaudir et se ravissant du spectacle de sa mort. Il pense également à tous les condamnés qui seront exécutés sur la guillotine après lui, dans la plus grande indifférence.
Une fois sa fille partie, le narrateur songe à lui écrire une histoire afin qu’elle garde un souvenir de lui.
Une note de l’éditeur nous indique que les feuillets de ce chapitre ont disparu ou que le condamné n’a pas eu le temps de les écrire.
Le narrateur se trouve dans une chambre à l’Hôtel de Ville. On l’avertit qu’il est l’heure d’y aller. Il raconte les préparatifs de son départ. Le bourreau et ses deux valets lui coupent les cheveux et le collet puis on lui lie les mains. Le convoi se déplace vers la place de Grève devant une foule de curieux, venus assister à l’exécution.
De nouveau animé par l’espoir de survie, le narrateur supplie un commissaire chargé de suivre l’exécution de lui accorder cinq minutes de plus afin d’obtenir une grâce de dernière minute. Le roman se termine sur la montée du condamné vers l’échafaud à 16 h pile.
Analyse :
Dans ces chapitres 38, 39, 40 et 41, le condamné appréhende l’échafaud et s’interroge à propos de la douleur ressentie. Bien qu’il sache son destin scellé et sa fin proche, il fait preuve de beaucoup de lucidité. Aussi il fait de l’humour noir en se moquant de ceux qui prétendent que la douleur n’est pas ressentie, étant donné qu’ils n’en savent rien. L’usage de questions rhétoriques prend alors également une tournure ironique. Cet usage permet également d’impliquer le lecteur afin de mieux illustrer l’absurdité de cette idée. Dans le chapitre 40, le narrateur compare sa situation à celle du roi. Dans ce chapitre Victor Hugo remet en évidence le pouvoir de vie ou de mort que la justice, incarnée par la figure royale, a sur le condamné. Le chapitre 41 est, quant à lui, structuré différemment. Le prisonnier parle avec un ton de plus en plus assuré et semble enfin accepter la mort avec courage. Cependant, plus nous avançons dans le chapitre, plus le registre devient pathétique. Le narrateur qui commençait ce chapitre calmement le finit en panique : ses réflexions ne jouent plus en sa faveur, quoi qu’il fasse il mourra et il n’y est pas préparé. On voit ici, une fois de plus, à quel point les vagues d’émotions qui animent le narrateur sont extrêmes et varient en très peu de temps.
Le rêve fait par le narrateur dans le chapitre 42, avant l’arrivée de sa fille, semble de nouveau être un moyen pour lui d’échapper à la réalité. Ce n’est désormais plus sa mémoire, mais son imaginaire qui l’aide à s’évader.
Enfin, la promesse de la venue de la fille du narrateur à la Conciergerie dans le chapitre 43 est un événement porteur d’espoir et de joie chez lui. À son arrivée, le prisonnier oublie, pendant quelques instants, sa sentence. Cependant ce moment de bonheur tourne vite au cauchemar puisque sa fille ne le reconnait pas. Ce moment qui devait être une source de joie immense le précipite dans un profond désespoir. Plus rien ne le retient désormais.
Les chapitres suivants s’enchainent à un rythme soutenu. Le prisonnier s’imagine la foule qui sera présente lors de son exécution. Contrairement à d’habitude, il ne se sert pas de son imagination pour fuir la réalité, mais, cette fois, pour la devancer.
Le chapitre 47 nous montre l’accélération des événements que le condamné subit. Il s’agit d’illustrer à quel point ce dernier n’est définitivement plus maitre de son destin. La cruauté de la condamnation est illustrée par le refus, pour lui, d’adresser un dernier mot à sa fille. Le condamné est totalement déshumanisé et est simplement devenu le fantasme morbide de la foule avide de sang venue assister à son exécution.
Les deux derniers chapitres du romain nous présentent un témoignage bouleversant et horrifiant des dernières minutes de vie d’un homme. Le récit de son exécution est présenté comme une scène presque joyeuse et vivante, caractérisée par la foule enthousiaste. La joie et la vivacité de cette foule contrastent avec la solitude et le désespoir profond du condamné. On observe également une dichotomie entre le point de vue du narrateur et celui de la foule. En effet, la focalisation interne autorise l’expression d’émotions intimes du personnage. On relève les réactions émotionnelles du narrateur qui souligne les réflexions subjectives du personnage pendant la scène. À l’inverse, la foule est anonyme et perçue comme une seule et même masse, dénuée de compassion et de sentiment. La cruauté de la peine de mort est également illustrée à travers la monstruosité de cette foule qui raille les forçats et le narrateur. Cette raillerie est caractérisée par le champ lexical du bruit et des cris enlevant toute identité humaine de la foule. De plus, la métaphore « marchands de sang humain » souligne l’exploitation de la peine de mort pour leur propre gain économique, renforçant l’absurdité et l’immoralité de la peine capitale. De plus, l’exécution est montrée comme un processus froid, à l’organisation implacable, illustrant par là son caractère inhumain. Le supplice du condamné est souligné par la forte présence du vocabulaire soulignant la torture psychologique. L’intensité du dernier voyage du condamné réside dans la vivacité et la tragédie de son témoignage et les perceptions dichotomiques entre le narrateur et la foule qui l’entoure. Ces caractéristiques aident à souligner le symbolisme d’une mise à mort cruelle pour condamner la peine de mort de manière implicite. Dans le dernier chapitre, Victor Hugo présente la peur du héros comme une peur commune à tous les condamnés à mort. La situation extrême est toutefois habituelle pour le juge, le commissaire, le magistrat et le bourreau. Ils veulent accomplir la tâche le plus vite possible de façon à en être débarrassés. Grâce à ces descriptions courtes, efficaces et son vocabulaire précis, Victor Hugo raconte son histoire à la manière des courants réalistes du 19e siècle. La conclusion du roman sur les termes « QUATRE HEURE » illustre le caractère implacable de l’exécution, sans retour possible. À travers ce chapitre de conclusion, Victor Hugo remet la volonté de vivre du narrateur au centre de l’attention du lecteur. L’auteur nous rappelle, par ce biais, la dimension inhumaine de la condamnation à mort, ce qui est la base de son plaidoyer contre la peine capitale.