Le Prince

Le Prince Résumé et Analyse

Dans le chapitre XII, “ Combien il y a de sortes de milices et de troupes mercenaires ”, Machiavel soutient qu'un souverain doit créer de bonnes lois et de bonnes armées. Il considère que les deux sont intrinsèquement liées et décide de se concentrer sur la formation des armées.

Les armées sont soit composées de mercenaires, soit de troupes auxiliaires, soit de troupes mixtes, soit des propres troupes de l’État. Les deux premières sont “ non seulement inutiles, mais même dangereuses. ”. En effet, les mercenaires “ servent sans aucune affection (...) veulent bien être soldats tant qu'on ne fait point la guerre ; mais sitôt qu'elle arrive ils ne savent que s'enfuir et déserter. ”. Ils sont, selon l’auteur, uniquement motivés par l’argent. Il considère que la faiblesse des différents États italiens est en grande partie due à l’usage de mercenaires. Machiavel énumère ensuite des exemples d’États dotés de leurs propres troupes (la Sparte antique, Rome antique, la Suisse contemporaine) et les compare aux Carthaginois, dont les armées de mercenaires se sont retournées contre leurs maîtres et ont failli les renverser.

Le chapitre XIII, “ Des troupes auxiliaires, mixtes et propres ”, définit les troupes auxiliaires comme des armées étrangères qui aident un souverain à sa demande. Machiavel les considère “ beaucoup plus dangereuses encore que les mercenaires. (...) car ces troupes sont toutes unies et toutes formées à obéir à un autre que vous ”. Les troupes mixtes sont composées à la fois de troupes auxiliaires et de mercenaires. L'idéal est pour un dirigeant est d'utiliser ses propres troupes. Cesare Borgia a commencé en s'appuyant sur des armées auxiliaires (les Français, en particulier), puis des mercenaires (les Orsini et les Vitelli) avant de recourir à ses propres troupes.

Dans le Chapitre XIV, “ Des fonctions qui appartiennent au prince, par rapport à la milice ”, Machiavel conclut qu'un souverain doit constamment étudier l'art de la guerre, notamment en temps de paix. S’intéresser à l’histoire de la guerre permet de “ considérer les actions des hommes illustres ”. Machiavel rappelle qu’Alexandre le Grand a imité Achille ; que César a imité Alexandre ; et que Scipion a imité Cyrus. Réitérant l'un des principaux thèmes du Prince, Machiavel souligne l'importance d'apprendre du passé afin de tracer un avenir meilleur.

Analyse

Dans ces trois chapitres, Machiavel raconte le déclin de trois États : l'Empire romain, la France et l'Italie. Nourrissant l'espoir d'une Italie unifiée, l’auteur la considère comme une seule entité bien qu'elle soit divisée à son époque. Plus important encore, il utilise l'histoire comme une arme, créant une rhétorique convaincante à partir de l’étude des faiblesses des stratégies militaires employées dans le passé.

La chute de l'Empire romain a commencé avec l'embauche des Goths comme soldats. Charles VII de France, après avoir libéré son royaume des Anglais, a immédiatement compris à quel point il était nécessaire que la France dispose de sa propre armée. Il a ainsi formé des troupes de cavalerie et d’infanterie avec des soldats locaux. Son fils Louis XI a abandonné cette initiative et a commencé à engager des troupes suisses. D'où la faiblesse actuelle de la France : “ Si l'ordre établi par Charles VII avait été conservé et amélioré, la France serait devenue invincible. ”.

S'appuyer sur les troupes suisses, argumente Machiavel, était une stratégie de court terme, qui trahit le manque de vision de Louis XI. L’auteur considère que les politiques de court terme sont souvent des actes de lâcheté et de procrastination. Un bon souverain doit au contraire regarder vers l'avenir et régler les problèmes qui lui sont présentés le plus vite possible. Machiavel présente l’histoire de France et celle de l’Empire romain comme un avertissement aux souverains présents, les intimant d’étudier la guerre comme un art et de raisonner pour analyser les stratégies des anciens : " Il doit faire surtout ce qu'ont fait plusieurs grands hommes, qui, prenant pour modèle quelque ancien héros bien célèbre, avaient sans cesse sous leurs yeux ses actions et toute sa conduite, et les prenaient pour règles. ”.

Lorsque l'Empire romain a commencé à décliner et que l’Église a commencé à renforcer son autorité, l'Italie s'est divisée en plusieurs États qui ont connu une série de soulèvements. Les citoyens des villes ont pris les armes contre les nobles qui les avaient gouvernés ; le pape, quant à lui, a encouragé ces révoltes, car elles contribuaient à l’affaiblissement des cités italiennes, renforçant ainsi son propre pouvoir. Des citoyens sont devenus souverains et l’Italie s’est morcelée en un enchevêtrement de républiques dispersées parmi les possessions de l'Église. Ni l'Église ni ces nouveaux dirigeants ne maîtrisaient bien l’art de la guerre ; ils ont donc engagé des mercenaires pour constituer leurs armées. Leur dépendance à l'égard des mercenaires a commencé à cette époque et persiste depuis. En conséquence, argumente Machiavel, l'Italie a été réduite à " l’esclavage et à l’avilissement ”.

Le titre de l’ouvrage, un nom singulier, reflète l’image d’un personnage solitaire qui, par lui-même, se fait une place dans l’histoire. À sa manière, Le Prince célèbre l'individualité : l'État le plus fort est celui qui utilise ses propres troupes, et qui résiste à toute l’influence extérieure ; le meilleur souverain est celui qui s'élève par sa propre force. Il n'est donc pas étonnant que ce manuel écrit aux temps des monarchies ait trouvé un large public dans les démocraties libérales des XXèmes et XXIèmes siècles.