“Quant à Fantine, c’était la joie. Ses dents splendides avaient évidemment reçu de Dieu une fonction, le rire. Elle portait à sa main plus volontiers que sur sa tête son petit chapeau de paille cousue, aux longues brides blanches. Ses épais cheveux blonds, enclins à flotter et facilement dénoués et qu’il fallait rattacher sans cesse, semblaient faits pour la fuite de Galatée sous les saules. Ses lèvres roses babillaient avec enchantement. Les coins de sa bouche voluptueusement relevés, comme aux mascarons antiques d’Érigone, avaient l’air d’encourager les audaces ; mais ses longs cils pleins d’ombre s’abaissaient discrètement sur ce brouhaha du bas du visage comme pour mettre le holà.”
Ce passage essaie de transmettre la beauté unique de Fantine. Hugo commence par une métaphore (en assimilant Fantine au rire lui-même), puis décrit l'habitude bizarre qu'a Fantine de porter son chapeau à la main et non pas sur sa tête, afin de laisser ses magnifiques cheveux libres. L'auteur fait également allusion aux mythes grecs pour décrire son apparence : Erigone était une jeune femme séduite par Dionysos et Galatée une statue ramenée à la vie qui tomba amoureuse de son créateur. La nature quelque peu contradictoire de Fantine, jeune femme douce qui a des relations sexuelles avant le mariage, ce qui est surprenant pour l’époque, est exprimée par la différence entre sa bouche séduisante et ses cils discrets.
“Montfermeil est situé entre Livry et Chelles, sur la lisière méridionale de ce haut plateau qui sépare l’Ourcq de la Marne. Aujourd’hui c’est un assez gros bourg orné, toute l’année, de villas en plâtre, et, le dimanche, de bourgeois épanouis. En 1823, il n’y avait à Montfermeil ni tant de maisons blanches ni tant de bourgeois satisfaits. Ce n’était qu’un village dans les bois. On y rencontrait bien çà et là quelques maisons de plaisance du dernier siècle, reconnaissables à leur grand air, à leurs balcons en fer tordu et à ces longues fenêtres dont les petits carreaux font sur le blanc des volets fermés toutes sortes de verts différents.”
Montfermeil est la ville où Cosette vit avec les Thénardiers. Les descriptions que fait Victor Hugo des villes françaises sont une caractéristique essentielle du roman.
“La face humaine de Javert consistait en un nez camard, avec deux profondes narines vers lesquelles montaient sur ses deux joues d’énormes favoris. On se sentait mal à l’aise la première fois qu’on voyait ces deux forêts et ces deux cavernes. Quand Javert riait, ce qui était rare et terrible, ses lèvres minces s’écartaient, et laissaient voir, non seulement ses dents, mais ses gencives, et il se faisait autour de son nez un plissement épaté et sauvage comme sur un mufle de bête fauve.”
Javert est comme une bête chassant sa proie. Intransigeant, il a une compréhension rigide et étroite du bien et du mal. Son visage reflète sa personnalité, une technique souvent employée par l’auteur.
“À chaque marche qu’il montait, c’était effrayant ; ses cheveux blancs, sa face décrépite, son grand front chauve et ridé, ses yeux caves, sa bouche étonnée et ouverte, son vieux bras levant la bannière rouge, surgissaient de l’ombre et grandissaient dans la clarté sanglante de la torche ; et l’on croyait voir le spectre de 93 sortir de terre, le drapeau de la terreur à la main. Quand il fut au haut de la dernière marche, quand ce fantôme tremblant et terrible, debout sur ce monceau de décombres en présence de douze cents fusils invisibles, se dressa, en face de la mort et comme s’il était plus fort qu’elle, toute la barricade eut dans les ténèbres une figure surnaturelle et colossale. Il y eut un de ces silences qui ne se font qu’autour des prodiges. Au milieu de ce silence le vieillard agita le drapeau rouge et cria : Vive la Révolution ! vive la République ! fraternité ! égalité ! et la mort !”
Désespéré, Mabeuf décide de rejoindre la révolution. Lors du premier affrontement avec l'armée, le drapeau rouge des rebelles est arraché de la barricade. Courageusement, Mabeuf sacrifie sa vie pour le récupérer, ce qui inspire les rebelles. Le vieux marguillier est devenu l'incarnation de la Révolution française.