Raphaël commence par raconter à son ami qu'à sa sortie du collège, il a entamé des études de droit afin de satisfaire un père autoritaire. Ce dernier contrôle la vie de son fils sous tous ses aspects, de ses études à ses loisirs. Il explique qu'un jour, alors qu'il était chez un de ses parents, le Duc de Navarreins, qu'il a utilisé de l'or que son père qui avait confié pour le jouer à une table de jeu, qu'il a gagné et remis la mise initiale dans la bourse de son père sans se faire prendre. Cette entorse à l'obéissance due à son père révèle à Raphael qu'il n'est plus un enfant, qu'il peut enfreindre les ordres de son père et qu'il est plutôt doué au jeu car capable de suivre par la pensée une partie en cours alors même qu'il a quitté la table de jeu. Lorsqu'il rentre chez lui, Raphaël apprend que son père a décidé de lui verser une pension pour apprendre à économiser. Son père veut faire de lui un homme d'État afin que le nom de la famille soit redoré. En effet, son père, descendant d'une lignée d'aristocrates auvergnats, est monté à Paris sous l'Ancien Régime et a réussi à faire sa place au coeur du pouvoir. Il a perdu ce pouvoir avec la Révolution de 1789, mais grâce à son mariage avec une riche héritière bourgeoise, a réussi sous l'Empire, à acheter des terres hors des frontières. Malheureusement, lorsque la monarchie est restaurée, ces terres lui sont réclamées par les pays souverains et les procès se multiplient. Raphaël endosse le poids de ce rôle et prend à sa charge le devoir se rembourser les créanciers de son père. Il en arrive ainsi à être contraint de vendre les propriétés dont il a hérité à la mort de sa mère à l'exception de la petite île où elle est enterrée. Son père meurt de chagrin en 1826 alors que Raphaël n'a que vingt-deux ans.
Raphaël rêve de rencontrer le grand amour, mais il ne trouve aucune femme à la hauteur de ses attentes. Il développe une vie intellectuelle grâce à laquelle il espère devenir quelqu'un de célèbre recherché par les femmes. Pendant trois ans, il réussit à vivre avec onze cent francs (Émile doute qu'il soit possible de vivre avec si peu). Il s'installe dans une petite chambre d'un hôtel tenu par Madame Gaudin. Cet hôtel, situé près de la Sorbonne, rue des Cordiers, est délabré. Madame Gaudin, sans nouvelle de son époux depuis la défaite de l'armée napoléonienne en Russie, vit dans l'hôtel avec sa fille Pauline. Pendant ces années passées dans cet hôtel, Raphaël se consacre à ses études. Il rédige une comédie et un ouvrage intitulé Théorie de la volonté. Ce livre, philosophique et scientifique, ne rencontrera pas le succès espéré. Raphaël apprécie cette vie studieuse et poétique. Il se propose de parfaire l'éducation de Pauline. Cette dernière, la filleule de la princesse Borghèse Pauline Bonaparte, est une jeune fille studieuse qui apprend vite le piano. Elle est attentionnée et rend des services à Raphaël comme lui préparer parfois un repas simple. Elle essaye d'égayer la vie de Raphaël. Ce dernier pourrait l'épouser mais Raphaël ne envisager de se marier avec une femme pauvre car, selon lui, une femme ne peut être désirable que si elle est riche.
Au début du mois de décembre 1829, Raphaël rencontre Eugène Rastignac. Ce dernier explique à son ami que s'il ne connait pas les bonnes personnes, il n'arrivera jamais à entrer dans le grand monde. Aussi, Eugène présente Raphaël à la Comtesse Foedora. Riche et particulièrement séduisante, Foedora est une femme mystérieuse à l'esprit fin. Raphaël tombe immédiatement sous son charme. Il est également fasciné par le luxe dans lequel elle vit. Dès lors, Raphaël rencontre souvent la Comtesse mais prend conscience que sa vie miséreuse sera toujours un obstacle entre elle et lui. Son amour grandit un peu plus à chacune de ses visites. Il peine à décrire l'exaltation qu'il ressent chaque fois qu'il la rencontre. Il est persuadé qu'il peut deviner ses moindres pensées. Ils semblent être unis par une entente particulière. Pourtant, après avoir décliné l'invitation au théâtre que Raphaël lui a faite, Foedora se rend audit spectacle sans lui. Raphaël le découvre. À la fin de la représentation, Foedora demande à Raphaël de la raccompagner jusqu'à sa voiture. Il pleut et le couple est abrité par un commissionnaire muni d'un parapluie. Raphaël se sent honteux de n'avoir pas une pièce à donner à ce commissionnaire en échange de ce service. Arrivés chez la Comtesse, celle-ci explique froidement à Raphaël qu'il n'est pas question d'amour entre eux. Dévasté par cette indifférence, Raphaël réalise que tous les sacrifices qu'il a consentis pour séduire Foedora ont été totalement vains et qu'il y a en réalité un abîme entre eux.
De retour à son hôtel, Raphaël surprend Pauline expliquer à sa mère qu'elle l'aime comme on aime un frère. Raphaël est profondément touché par les propos élogieux qu'il entend à son égard. Il réalise alors la différence qu'il y a entre la douceur simple et sincère de Pauline et la froideur égoïste de la riche Foedora. Raphaël annonce alors à Pauline qu'il a décidé de faire un long voyage et lui donne son piano qu'il ne pourra emmener. Madame Gaudin dit qu'elle a rêvé que son mari allait revenir avec une grande fortune. Le lendemain, Raphaël et Eugène se rendent au Café de Paris où il rencontrent un riche éditeur qui publie sous son nom des ouvrages qu'il n'a pas écrits. Finot explique qu'il est à la recherche d'une plume pour écrire de faux mémoires sur l'affaire du Collier de la reine Marie-Antoinette. Poussé par Rastignac et par le besoin d'argent, Raphaël accepte ce travail qu'il juge néanmoins dégradant. Sur les Champs-Élysées où se rendent ensuite les deux amis, ils croisent Foedora. Le sourire qu'elle adresse à Raphaël qui retrouve sa joie de vivre. Il lui semble qu'avec son nouveau chapeau et son costume tout neuf, la vie lui sourit.
Le lendemain, une lettre de Foedora lui est remise par Pauline. La Comtesse lui demande de passer la prendre au Luxembourg pour l'emmener se balader au Jardin des Plantes. Le contrat d'édition pour les faux mémoires n'étant pas encore signé, Raphaël n'a pas le moindre sous. Il est au désespoir lorsqu'il trouve miraculeusement une pièce dans un tiroir. Le lendemain, la promenade avec Foedora se transforme en un véritable cauchemar pour Raphaël car il pleut, il doit s'acquitter du fiacre et Foedora se montre glaciale. Elle lui dit qu'en réalité, elle cherche à obtenir la protection du Duc de Navarreins, cousin de Raphaël, afin qu'il l'aide à régler ses affaires en Russie. La journée se termine en tête à tête chez Foedora. Heureux, Raphaël en oublie son rendez-vous avec l'éditeur.
Le jour suivant, le contrat est signé. Raphaël règle ses dettes. Les trente francs qui lui restent alors en poche disparaissent à leur tour et Raphaël se retrouve une fois de plus sans argent, faute de recourir au système anglais (l'emprunt) dont il ne connait pas bien le fonctionnement. Comme promis, il présente Foedora à son cousin. Dès lors, la Comtesse se met à ignorer totalement Raphaël. Malgré l'amour qu'il continue à lui porter, Raphaël pense que lui seul peut comprendre l'âme de Foedora et décide de se cacher dans sa chambre, derrière un rideau, pour découvrir son intimité. Au lieu de cela, il surprend des propos moqueurs de Foedora à son encontre. Elle se moque ouvertement de lui en présence de ses invités. Il apprend également, lors d'un échange entre la Comtesse et sa femme de chambre, qu'elle n'a ni intention de se marier, ni intention d'avoir des enfants. Elle part se coucher en soupirant "Mon Dieu". Pourtant, deux jours plus tard, Raphaël lui déclare sa flamme et lui révèle tous les sacrifices qu'il a dû faire pour la séduire. Il apprend alors que le soupir qu'elle a poussé au coucher avait en réalité pour cause une transaction financière oubliée par Foedora. La conversation s'envenime. La Comtesse se moque de Raphaël et celui-ci répond par un discours furieux et violent.
Raphaël est malheureux. Il avoue à Rastignac qu'il veut en finir. Eugène l'entraine alors dans la débauche qu'il considère comme une façon de mourir plu élégante que le suicide. Raphaël quitte l'hôtel de madame Gaudin et s'installe dans un appartement rue Taitbout grâce à l'argent que Rastignac a gagné au jeu. Malheureusement la débauche se révèle être un mauvais médicament pour Raphaël qui s'épuise peu à peu. Il se retrouve pourchassé par des huissiers et des créanciers au point de devoir vendre l'ile sur laquelle sa mère est enterrée. Une partie du prix de la cession sert à rembourser ses dettes et le reste sert à continuer de s'enfoncer dans les excès. Lorsqu'il ne lui reste plus que vingt francs en poche, il décide de tenter sa chance au jeu.
Raphaël interrompt son récit en repensant à la peau de chagrin glissée dans sa poche. Il réalise que son ami Émile n'a quasiment rien écouté de sa confession. Il lui révèle alors le pouvoir magique de la peau. Émile a du mal à y croire. Les deux amis décident de mesurer la peau. Raphaël émet un souhait, celui de recevoir deux cent mille livres de rente. Il s'endort. Le lendemain, alors que tous les convives émergent de l'orgie, on annonce à Raphaël qu'il vient d'hériter d'un oncle décédé trois ans plus tôt en Inde. Raphaël constate alors que la peau a rétréci et mesure l'ampleur du pacte qu'il a passé. Les invités cherchent à obtenir de lui qu'il exauce leurs voeux de richesse, mais Raphaël ne cède pas. Il s'enivre pour oublier ce qui l'attend.
Analyse
La seconde partie du roman opère une rupture dans la lecture. Raphaël, durant la soirée du banquier Taillefer, se livre en confession à son ami Émile. Il revient sur son passé et sur ce qui l’a amené à vouloir se suicider. Cette seconde partie brouille la lecture pour plusieurs raisons. En premier lieu, durant la majeure partie du temps, le narrateur de la première partie n’intervient plus. Le récit, qui était à la troisième personne, passe à la première personne. C’est Raphaël qui raconte. Le narrateur omniscient revient à la toute fin de la partie lorsque le récit revient à la situation actuelle de Raphaël. Ensuite, cette seconde partie est perturbante, car on n’y parle plus de la peau de chagrin. Le fantastique, dans lequel le lecteur vient d’être plongé dans la partie précédente, disparait manifestement du récit. De conte fantastique, l’histoire semble relever dorénavant du genre réaliste. Pourtant, on y devine un lien avec le fantastique, car les effets ravageurs de la peau sont comparables avec la vie de débauche qui dévore Raphaël, avec son amour pour Foedora qui le consume ou avec sa désillusion en la société qui le désespère. Enfin, ce que raconte le héros ne semble avoir aucun rapport avec le récit initial. Le lecteur se questionne sur l’intérêt de cette partie au sein de l’histoire.
C’est à cause de cette partie qui semble incohérente avec le reste du roman que La Peau de chagrin a longtemps été considérée comme une œuvre ratée. Pourtant, la première partie introduit la seconde de façon logique. En effet, c’est parce que Raphaël remet son projet de suicide qu’il entre dans la boutique de l’antiquaire et obtient la peau qui lui permet de se retrouver au bal du banquier au cours duquel il fait sa confession. Sans la première partie, il ne peut y avoir la seconde partie. À l’inverse, la seconde partie permet au lecteur de comprendre pourquoi Raphaël projetait de se suicider et pourquoi il a accepté de signer le pacte avec la peau. La confession explique à quel point il est naturel pour Raphaël d’être attiré par la mort lorsqu’il explique, par exemple, qu’il est resté cloîtré dans une petite chambre misérable pour y rédiger un ouvrage pendant trois ans. Il s’est, en quelque sorte, tué à la tâche pour vivre. De même, les déboires qu’il rencontre avec Foedora l’amènent à plonger dans la débauche et à réaliser que ce type d’existence n’est qu’une forme déguisée de suicide. Ainsi, depuis toujours, il se débat en permanence entre la vie et la mort. La peau de chagrin réalise tous ses vœux, ses désirs (la vie), mais cela abrège sa vie (la mort).
Enfin, cette seconde partie a également pour intérêt d’introduire deux personnages importants: Pauline et Foedora. Cette seconde partie est une sorte d’articulation entre la première et la troisième partie. Dans sa confession, Raphaël explique qu’il a rencontré Pauline lorsqu’il était locataire de l’hôtel tenu par la mère de celle-ci. Contrairement à sa rencontre avec Foedora qui sera vécue comme un évènement marquant pour Raphaël, sa rencontre avec Pauline n’a rien de remarquable. Cette dernière est la fille de la gérante de l’hôtel dans lequel il vit. Elle fait partie du quotidien de Raphaël. À l’inverse, pour lui, Foedora représente l’exceptionnel. Pourtant, Pauline présente beaucoup de points communs avec lui. L’histoire familiale de Raphaël et celle de Pauline sont assez similaires. Le père de Pauline, disparu, a laissé son épouse et leur fille sans ressource. Quant au père de Raphaël, il s’est retrouvé criblé de dettes en raison des nombreux procès qui lui sont intentés ; dettes que Raphaël s’oblige à rembourser. On comprend dans cette confesion que Raphaël est prisonnier des valeurs inculquées par son père et de son emprise. Cela l'empêche de s'adapter à la société dans laquelle il évolue. Pauline et lui souffrent de la pauvreté et de l’histoire familiale dont ils ont hérité. Tout les pousse à vivre à l’écart de la belle société malgré leurs liens avec l’aristocratie. Cette pauvreté est un double obstacle à l’amour entre Pauline et Raphaël. En effet, non seulement Raphaël se refuse à offrir une vie misérable à Pauline, mais il ne conçoit pas non plus qu’un amour puisse exister dans la misère. Aux yeux de Raphaël, Pauline incarne deux figures inconciliables : d’une part l’amour idéal, la bonté et la beauté et, d’autre part, la pauvreté, la famille (Pauline est comme une sœur). Foedora est un personnage qui incarne tout ce que Pauline n’est pas. Il va tout d'abord la considérer comme un marchepied pour parvenir à devenir riche avant de succomber à son charme et en tomber éperdûment amoureux. Mais la Comtesse est une femme intéressée. Elle ne se lie avec Raphaël que parce qu’il peut lui être utile pour régler des affaires grâce à son lien avec le Duc de Navarreins. Elle joue la séduction, mais repousse froidement ses avances (et celles de tous ses courtisans), refusant de se marier et d’avoir des enfants. Elle est très riche, mais n’est qu’apparence. Elle est une enveloppe sans âme. Foedora est inaccessible à Raphaël. Elle représente tout ce à quoi il aspire, mais qu’il n’aura jamais.
Raphaël incarne le personnage romantique par excellence. Foedora et Pauline représentent, chacune à leur façon, l'amour impossible.