La nature
Rousseau précise qu’il ne peut identifier les causes de l'inégalité sans étudier la question du rôle de la nature. La nature est dépeinte de deux façons. D’une part, elle représente ce qu'était la vie de l'homme avant les effets corrupteurs de la société. Rousseau pense que si la vie de l'homme était difficile, il n'en était pas moins libre et donc heureux. D’autre part, la nature est le critère ultime de légitimité des institutions sociales. Puisqu'il n'y avait pas de gouvernement dans la nature, aucun gouvernement n'est véritablement légitime. Tous sont issus de l'inégalité. Dans l'état de nature, chacun plaignait les autres et craignait pour lui-même. Rousseau considère que ces sentiments sont la seule base légitime de la vie sociale. Par conséquent, pour être de meilleurs citoyens, nous devons cultiver nos sentiments plutôt que de discuter de la forme de gouvernement qui fonctionne le mieux.
La liberté
Rousseau estime que l'homme ne peut être heureux sans être libre. Mais qu'est-ce que la liberté ? Dans la Constitution américaine, par exemple, le gouvernement accorde aux individus certaines libertés – liberté d'expression, liberté de religion, etc. Le gouvernement promet de ne pas intervenir dans les droits que possède l'individu ou de ne pas les enfreindre. Rousseau conteste ce point de vue. Pour lui, la liberté ne peut consister qu'en l'indépendance. Tant que l'individu dépend des autres pour ses libertés, celles-ci ne sont pas vraiment des libertés. La seule liberté consiste à ne pas se faire dire ce qu'il faut faire, et à ne pas dire aux autres ce qu'il faut faire.
La corruption de la société
Les philosophes des Lumières – période intellectuelle qui s’est déroulée du milieu à la fin du XVIIIème siècle en Europe occidentale – étaient convaincus que les êtres humains pouvaient s'améliorer et améliorer le monde en suivant la culture et la science et en rejetant les superstitions de la religion. Cette période a été marquée par un essor de la raison et par des soulèvements démocratiques contre les monarchies, dont les révolutions américaine et française sont deux exemples importants.
Rousseau propose une autocritique des Lumières. Il est profondément sceptique quant à l'idée qu'une institution sociale puisse améliorer l'humanité. Il est convaincu que toute société aliène nécessairement l'être humain de ses véritables sentiments et le contraint à un état de dépendance vis-à-vis des autres, que ce soit pour sa subsistance ou son estime. La société n'est efficace que pour inventer des solutions aux problèmes qu'elle a créés en premier lieu. La culture et la science substituent des sentiments biaisés et des connaissances inutiles à la seule chose qui compte vraiment, la connaissance de soi. Ce point de vue déconcerte de nombreux lecteurs de Rousseau. Le sentiment de contradiction issu de la douleur de vivre dans un monde que l'on ne pense pas légitime est au cœur de toute sa pensée. Ce thème se retrouve dans le concept de perfectibilité : l'Homme est capable de s'améliorer, mais au prix de son propre bonheur.
L'autorité
Une autre question centrale du Second Discours est de savoir comment les êtres humains ont pu accepter une quelconque autorité sur eux-mêmes, s'ils étaient heureux en tant qu'individus libres. À l'époque de Rousseau, il existait de nombreuses explications quant à l'origine de l'autorité (la légitimité par laquelle le roi pouvait commander ses sujets ou un parlement pouvait adopter des lois) : Dieu, la raison, la nécessité pratique ou la supériorité naturelle de certains êtres humains sur d'autres. Les réflexions de Rousseau sur l'état de nature, dans lequel tous les individus sont égaux parce qu’indépendants, suggèrent que toutes les formes d'autorité sont, en un sens, illégitimes, car elles sont enracinées dans l'inégalité entre les gouvernés et ceux qui les gouvernent. Ce serait l'un des concepts animateurs des révolutions américaine et française.
L’inégalité
Comme le suggère le titre du discours, Rousseau s'intéresse avant tout à la question de l'inégalité. D'où vient-elle, et peut-on vraiment la considérer comme légitime ? À l'époque de Rousseau, de nombreuses personnes pensent que les individus sont inégaux, qu'ils l'ont toujours été et qu'une force, qu'elle soit divine ou naturelle, les a créés et maintenus dans cet état. Rousseau rejette ce point de vue. Sa description d'un état de nature est un outil rhétorique puissant pour faire comprendre au lecteur à quel point l'inégalité est contre-nature et source d'angoisse pour une personne vraiment libre. Pour Rousseau, l'histoire humaine est celle de l'aggravation de l'inégalité et de la création de structures pour la présenter comme légitime. En ce sens, l'histoire humaine est une série d’erreurs codifiées dans nos institutions et dans nos esprits, nous amenant progressivement à accepter ce que Rousseau perçoit comme une forme d’esclavage étranger à la nature humaine.
Le contrat social
Si les premiers êtres humains étaient libres, pourquoi auraient-ils voulu s'engager dans quelque chose d'aussi contraignant que la société ? Telle est la question à laquelle Rousseau est confronté. Il rejette deux réponses courantes à cette question. La première est que les forts ont conquis les faibles. Rousseau ne conçoit pas qu'une personne vraiment libre puisse renoncer consciemment à sa liberté. Les vaincus auraient préférer se tuer. La deuxième est que les faibles se sont regroupés pour se protéger des forts. Rousseau pense au contraire que la dépendance à l'égard d'autrui aurait largement dépassé les protections que la société peut offrir. Les riches et les pauvres, c'est-à-dire les forts et les faibles, sont entrés en société ensemble, car l'inégalité qui existait entre eux provoquait des conflits perpétuels. Ainsi, les premiers accords sociaux formalisés ont été conclus en croyant à tort qu'ils préservaient la liberté des deux parties, alors qu'en réalité ils la détruisaient.
Les animaux
Comme de nombreux philosophes, Rousseau est fasciné par la vie animale, par les nombreuses similitudes qu'elle partage avec la vie humaine, et par l’identification d’une différence cruciale entre les deux. Rousseau tend à penser que ce qui rend l'être humain supérieur aux animaux le rend également malheureux. Il rejoint en ce sens les idées du philosophe Blaise Pascal. L'humain est à la fois l'être le plus élevé de la création, et pour cette raison, aussi le plus bas, car son esprit le fait aspirer à des choses qu'il ne pourra jamais atteindre et le fait travailler à toutes sortes de projets inutiles. Parce qu'il a un esprit, il est conscient des limites de sa propre vie, ce qui n'est pas le cas des animaux. Les animaux servent de modèle pour illustrer ce que serait la vie humaine sans la capacité de perfectibilité de soi.