Le Procès

Le Procès Résumé et Analyse

Le Procès s’ouvre sur un commentaire du narrateur quasi-omniscient, selon lequel on avait sûrement calomnié Joseph K. puisqu’il fut arrêté un beau matin sans avoir jamais rien fait de mal.

Le matin de son trentième anniversaire, K., jeune cadre travaillant dans une banque et vivant dans une pension, attend que la cuisinière arrive avec son petit-déjeuner. Il voit par la fenêtre que la vieille dame qui habite en face de son immeuble le regarde de façon inhabituellement insistante. Intrigué, K. sonne de nouveau l’employée, mais l’on frappe brusquement à la porte et un homme entre dans la chambre, vêtu d’une tenue noire qui suggère un uniforme. K. lui demande de se présenter, mais l’homme ne répond pas. Il entend des voix dans le salon, et s’habille pour pouvoir aller découvrir l’origine de ce grabuge. L’intrus lui demande s’il ne préférerait pas rester tranquille, mais K. ouvre la porte.

Dans le salon en bazar de Mme Grubach, K. découvre un homme assis près de la fenêtre en train de lire un livre. Sans lever les yeux, il lui dit que Franz aurait dû lui ordonner de rester dans sa chambre ; K. constate que la vieille femme de l’autre côté de la rue s’est déplacée jusqu’à son propre salon pour pouvoir continuer à les observer. Alors que K. se décale pour s’éloigner des deux hommes, ceux-ci se mettent devant la porte pour l’empêcher de partir et lui disent qu’il est leur prisonnier. K. leur demande alors s’il peut savoir pourquoi, mais les deux gardes lui répondent que ce n’est pas à eux de lui dire et lui ordonnent d’aller attendre dans sa chambre. Ils ajoutent qu’il devrait être heureux d’être tombé sur eux car rien ne les oblige à être aussi polis. Franz et son collègue tâtent la chemise de nuit de K. et lui indiquent que celle qu’il portera plus tard sera bien moins confortable. Ils ajoutent qu’il a intérêt à leur donner toutes ses affaires maintenant et qu’ils les lui rendront plus tard si l’issue de son procès s’avérait favorable, car les habits sont souvent perdus ou vendus lorsqu’ils sont placés au dépôt.

K. se demande ce que les autorités pourraient bien lui reprocher qui justifierait de pénétrer chez lui ainsi, car le pays est en paix et les lois sont toujours applicables. Peut-être s’agit-il d’une blague de ses amis pour son trentième anniversaire ? K. se dit que dans ce cas, il n’a qu’à jouer le jeu.

K. rentre dans sa chambre et fouille dans ses tiroirs jusqu’à ce qu’il trouve son certificat de naissance pour justifier son identité auprès des gardes. En retournant dans le salon, il voit Mme Grubach s’apprêter à rentrer dans la pièce avant de faire demi-tour et de fermer sa porte. Assis près de la fenêtre, les deux gardes mangent le petit-déjeuner de K. et, entre deux tartines de miel, lui disent que la logeuse ne peut pas entrer car il est en état d’arrestation. K. leur montre ses papiers d’identité et leur demande de faire de même, mais le deuxième garde lui dit qu’il est bien puéril et que se disputer avec deux personnes peu gradées comme eux ne va rien changer à son procès. Il lui assure que toute cette opération a été préparée depuis longtemps et qu’il n’y a aucun risque que ce soit une erreur.

Alors que K. continue à interroger les gardes pour tenter de leur soutirer une information, ils lui reprochent de clamer son innocence tout en admettant ne pas connaître la loi. K. se dit qu’il ne devrait pas perdre son temps à se disputer avec des fonctionnaires de bas-étage aussi stupides et que quelques mots avec quelqu’un de son niveau devrait suffire pour résoudre ce problème. Souhaitant mettre un terme à tout ce cirque, il demande à parler à leur supérieur, mais le second garde, dont on a appris entre-temps qu’il s’appelait Willem, lui dit d’attendre dans sa chambre. Il lui dit qu’ils peuvent lui apporter un petit-déjeuner s’il leur donne de l’argent.

K. finit par abandonner et s’allonge sur son lit pour manger une pomme qu’il avait laissée sur la table de nuit. Il se dit qu’il ne sera pas capable d’aller travailler ce matin mais que, compte-tenu de son rang dans la hiérarchie de la banque, cela ne devrait pas être un problème. Il considère brièvement de mettre fin à ses jours mais se dit que la solution est un peu extrême puisque pour l’instant tout cela lui a seulement coûté un petit-déjeuner. Il entend que le chef des gardes voudrait lui parler, et les deux hommes lui indiquent qu’il est impensable de rencontrer leur supérieur en portant une chemise de nuit. Ils l’envoient s’habiller et insistent pour qu’il porte une veste noire. Une fois habillé, il rencontre leur superviseur. Celui-ci est installé dans une autre chambre, en compagnie de trois jeunes hommes.

K. et le chef des gardes discutent des événements de la matinée et K. demande qui mène l’accusation et quelles sont les charges retenues contre lui. Le chef des gardes lui répond qu’il n’est au courant de rien et qu’il ne saurait même pas lui dire s’il est accusé de quoique ce soit. Il lui conseille de ne pas s’occuper des gardes et de se concentrer sur ce que le futur lui révèle.

K. a l’impression d’être traité comme un enfant, ce qui est très énervant. Il tente de se calmer et de réfléchir à voix haute afin de réaliser à quel point toute cette situation est absurde. Le chef des gardes lui indique qu’il pourrait faire appel à un avocat commis d’office mais K. ne voit pas l’intérêt pour l’instant. Il finit même par s’énerver contre les voisins qui observent la scène par la fenêtre et profitent du spectacle. K. se résout à renoncer à comprendre la situation et tend la main au chef des gardes, qui ne la saisit pas et préfère mettre son chapeau. L’homme lui dit qu’il a rempli sa mission de la journée, qui était de l’informer de son arrestation et d’observer sa réaction, et qu’ils n’ont tous les deux plus qu’à reprendre le cours de leur journée.

Évidemment, K. est confus : a-t-il vraiment été arrêté ? Rien ne l’empêche d’aller travailler ni de se déplacer comme il le souhaite. Le superviseur lui a dit que les trois jeunes hommes étaient des employés de la banque qui allaient l’aider à se rendre au bureau. K. réalise qu’il les a déjà vus et s’étonne de ne pas les avoir reconnus plus tôt. Il salue donc Rabensteiner, Kullisch et Karminer, qui ont l’air d'être de bonne humeur. Une fois dans la rue, ils hèlent un taxi et se rendent à la banque. K. se rend compte qu’il n’a pas vu les deux gardes et leur superviseur partir de chez lui, et se promet d’ouvrir l'œil.

Analyse

L’incipit du Procès met tout de suite en valeur le principal conflit à l'œuvre dans ce roman : K. est arrêté alors qu’il n’a commis aucun crime. Kafka cristallise très tôt cette absurdité, cette injustice, contre laquelle K. va devoir se battre, en vain, tout au long de l'œuvre. La première phrase laisse entendre que des rumeurs ont circulé à son sujet, et c’est bien le seul indice que donnera l’auteur sur les raisons de l’arrestation. En dehors de cet élément, les motifs de l’arrestation demeureront un mystère et pour K, et pour le lecteur.

Le fait que le petit déjeuner de K ne soit pas servi, et qu’un homme inconnu, employé par une autorité mystérieuse, soit debout dans l’appartement, marque le début d’une suite ininterrompue d'événements qui paraîtront plus relever du rêve que de la réalité. À l’occasion de la discussion entre K. et les deux gardes, Kafka introduit les thèmes de l’obéissance et de la futilité. Alors que K. panique et réfute les accusations portées contre lui, les gardes refusent de divulguer la moindre information sur son dossier. Willem et Franz se dédouanent de toute responsabilité en disant être des fonctionnaires de bas-étage simplement chargés de transmettre les ordres du tribunal. Ils sont très soucieux d’appliquer les consignes qui leur ont été données et attendent de K. qu’il fasse la même chose.

K. découvre rapidement que l’obéissance aveugle des gardes aux ordres de leur hiérarchie dans un système ultra-bureaucratique l’empêchera de leur soutirer la moindre information. En colère et agité, il finit par leur obéir en restant dans sa chambre. Il se rassure en se disant qu’il suit leurs ordres car ils sont trop stupides pour que la discussion soit vraiment productive.

K. espère que parler à quelqu’un de son rang social permettra de mettre fin à cette situation absurde, mais le superviseur des gardes utilise les mêmes arguments que ses employés pour refuser de lui donner des informations. Kafka insiste donc sur le fait que tous les fonctionnaires avec qui K. échange sont des employés peu qualifiés, et les vrais responsables, les juges, paraissent relever de la légende plus que de la réalité. De cette façon, le tribunal demeure mystérieux et inatteignable, ce qui assoit son autorité. Il semble même permis de penser que les fonctionnaires haut-placés n’existent pas du tout.

Kafka introduit dans ce chapitre le thème de la distraction : alors qu’il essaie d’éclaircir le mystère qui entoure sa situation, il est distrait par les personnes qui l’observent depuis l’immeuble en face du sien. De même, il est ensuite distrait par les trois jeunes hommes qui sont entrés dans la chambre de Mlle Bürstner. Ces distractions participent à abattre K., qui déploie beaucoup d’énergie pour comprendre la situation et s’en sortir.