Le Procès

Le Procès Résumé et Analyse

K. se rend chez Huld pour le congédier et un accusé décharné, nommé Block, lui ouvre la porte. K. se méfie de lui après avoir vu Leni dans le couloir, vêtue uniquement de son tablier. Block emmène K dans la cuisine où Leni prépare de la soupe. Là, K. l'accuse d'être la maîtresse de Block, ce qu'elle nie fermement. Tandis que Leni sert de la soupe à Huld, K. apprend par Block que son procès est en cours depuis cinq ans. Il a engagé cinq avocats, ce qui l’a ruiné, et doit aller au tribunal presque tous les jours pour s’asseoir avec les autres accusés. Lorsqu'il a vu K passer avec l'huissier de justice, Block et d'autres prévenus ont déduit du visage fermé de K. et de ses lèvres pincées qu’il était sur le point d’être condamné. K. sort un petit miroir de poche, examine ses lèvres et lui répond qu’elles n’ont rien de spécial.

Espérant obtenir des informations utiles, K. écoute Block expliquer comment il avait d’abord espéré obtenir des progrès tangibles, tout naïf qu’il était. À la place, il a reçu des demandes de renseignements sur les mêmes éléments, auxquelles il a répondu avec les mêmes réponses. Des rumeurs se sont ensuite progressivement propagées parmi ses collègues et sa famille, avant même qu’une première date d’audience ait été fixée. Aucun de ses avocats n'avait jamais été en mesure d’obtenir une date d’audience. Leni revient et dit à K. que Block est terriblement bavard et qu’il ne faut pas lui faire confiance. Huld le fait souvent attendre à la maison pendant trois jours avant de le voir, alors il dort avec elle dans sa petite chambre de bonne. Soudain, K. ne supporte plus la vue de Block.

Leni tente d'arrêter K. lorsqu’il lui dit qu’il va renvoyer Huld, mais K. se précipite dans sa chambre et verrouille la porte. L'avocat commente les avances de Leni et dit à K. de ne pas trop s’en préoccuper car Leni est attirée par tous les accusés, mais K. n’y prête pas vraiment attention et lui répond qu’il va le congédier. Il arrivait à ne pas trop s’inquiéter de l’affaire lorsqu’il n’avait pas d’avocat, mais cela l’angoisse terriblement depuis qu’il engagé Huld, au point que cela lui gâche la vie. Huld implore K. de revenir sur sa décision, ce qui agace fortement K. L’avocat dit alors à Leni et Block d’entrer dans la pièce.

Block et Leni s'agenouillent au chevet de Huld, à qui l’employée dit qu’elle a gardé Block enfermé toute la journée dans la chambre de bonne et vérifié régulièrement qu’il lisait bien tous les livres de droit qu’il lui avait prêtés. Huld répond que les livres sont bien trop compliqués pour Block mais que cela servira au moins à lui montrer à quel point la bataille judiciaire est difficile. Sur un ton condescendant, Huld raconte la conversation qu’il a eu avec un juge plus tôt dans la journée : le magistrat lui a conseillé de ne pas faire confiance à Block, qui est à peine assez malin pour faire durer le procès. Block proteste, mais Huld lui ordonne de se mettre à genoux et lui dit que la peur qui transparaît de chacune des paroles de Block le dégoûte. Block s'effondre sur le sol en signe de reddition et s'ébat sauvagement sur le tapis à côté du lit. K. interprète tout cela comme comme une démonstration de la domination que Huld exerce sur ses clients.

À la banque, K est chargé de montrer les joyaux architecturaux de la ville à un important responsable italien - une tâche dont il craint qu’elle donnera au directeur adjoint l’occasion de fouiller dans ses affaires. Tôt dans la journée, il rencontre l'Italien dans son bureau et lui donne rendez-vous à dix heures pour visiter la cathédrale. Alors que K. révise ses notions d’italien, Leni l'appelle pour lui dire "ils te surveillent". K. prend un taxi puis attend l'Italien dans la cathédrale glaciale, où un abbé monte en chaire. K. décide de partir avant le début du sermon, mais l’homme l'interpelle en l’appelant par son nom. Il se présente comme un aumônier que l’on a chargé de discuter avec K. Il dit à K. que la raison pour laquelle son procès se passe mal est qu’il a demandé de l’aide à trop de personnes. Il ajoute que K. dessert sa cause, et lui récite une parabole sur la déception. Il raconte l’histoire d’un homme qui est arrivé devant la porte de la Loi, devant laquelle se trouve un portier qui lui dit que derrière cette porte se trouvent plusieurs portes successives gardées par d’autres portiers de plus en plus puissants. Le portier interdit au visiteur de passer la porte d'entrée. L’homme attend pendant des années, assis sur un tabouret, en demandant à plusieurs reprises s’il peut entrer dans la Loi : le portier lui répond toujours non. L’homme vieillit, dépérit, et, à la fin de sa vie, finit par demander pourquoi il est le seul à avoir demandé à entrer alors que tout le monde est à la recherche de la Loi. Le portier répond que personne d'autre que lui ne peut entrer car l’entrée est destinée à lui seul, mais lui dit qu’il va désormais fermer la porte. L’homme ne pourra donc jamais entrer et a attendu pour rien.

K. voit dans la parabole le récit d’une trahison de la part du portier. L’abbé, au contraire, estime qu’il ne faisait que son devoir, et pense même que c’est le portier qui a été trompé et non le visiteur. Le portier, un peu simple d’esprit, a plus peur de la Loi que de l’homme qui souhaite y entrer, et ne sait pas vraiment ce qu’il y a derrière cette porte. Les deux hommes discutent jusqu’à ce que K. soit fatigué, sans qu’il ait réellement compris la signification de cette parabole. L’ecclésiastique le congédie en lui disant de retourner à la banque s’il le faut, et ce désintérêt pour sa situation surprend K. Il rentre chez lui, désorienté.

La veille du trente-et-unième anniversaire de K., deux hommes pâles et imposants, vêtus d’une redingote et d’un haut de forme, se présentent devant sa chambre. K., habillé de la même manière, les salue, comme s’il s’attendait à ce que l’on vienne le chercher. Une fois dans la rue, les deux hommes se mettent de chaque côté de lui et lui saisissent les mains. Il proteste, jusqu’à ce qu’il voie Mlle Bürstner de l’autre côté de la rue - ou peut être était-ce une autre femme -, ce qui lui fait prendre conscience qu’il est inutile de résister. La résistance n’a rien d’héroïque, pense-t-il. À défaut de pouvoir résister, il peut au moins tenter de garder les idées claires. Il se dit alors qu’interférer dans le cours de la vie en demandant de l’aide à tant de personnes différentes n’était pas une bonne stratégie de défense.

Les hommes quittent la ville et emmènent K. à travers champs jusqu'à une petite carrière abandonnée. La lueur de la lune éclaire la scène. Les hommes essuient la sueur de leur front et débattent sur la suite des évènements. L’un d’eux déshabille K. et plie soigneusement ses vêtements, comme s’ils allaient être réutilisés. L’air est froid, K. frissonne. Les bourreaux posent sa tête sur une grande pierre. Un homme sort un couteau de boucher à double tranchant de sa veste, et son collègue et lui examinent la lame à la lumière de la lune.

Alors que les deux hommes s’échangent le couteau en se disputant pour savoir qui doit l'utiliser, K. regarde le dernier étage d’une maison qu’il voit depuis la carrière. Il y voit une silhouette humaine mince et frêle ouvrir les fenêtres et déployer ses bras. Peut-être s’agit-il d’un ami ou d’une personne charitable qui tente de l’aider. Il se dit qu’il y a encore de quoi résister, car même la plus implacable des logiques ne peut résister à un homme qui a envie de vivre. Il se demande où est le juge qu'il n'a jamais vu et la cour suprême où il n'est jamais allée. K lève la main et tend les doigts vers la silhouette à la fenêtre. L’un des deux hommes le tient par le cou tandis que l’autre plonge un couteau dans son cœur et le tourne deux fois. Sa vision se trouble, mais K. voit ses bourreaux s’accroupir près de lui pour contempler “le jugement dernier”. Il utilise ses dernières forces pour dire “Comme un chien !”, “comme si la honte devait lui survivre”, écrit Kafka.

Analyse

Kafka évoque de nouveau les thèmes de la luxure et de la distraction lorsque K. arrive chez Huld. Bien qu’il se soit rendu chez l’avocat dans le but de le congédier, il est distrait par la possibilité que Block soit lui aussi un amant de Leni. En réalité, lui dit Huld, Leni est pathologiquement attirée par tous les prévenus, ce qui indique qu’elle couche aussi avec Block.

K. est de nouveau distrait lorsque Block lui raconte qu’il défend son affaire devant les tribunaux depuis cinq ans. Il l’écoute attentivement et le fait que Block ait renvoyé plusieurs avocats conforte K. dans sa décision de remercier Huld. Le fait de montrer à quel point Block est pathétique permet d’apercevoir ce que sera plus tard la vie de K. Block a perdu son travail et n’a plus de ressources depuis qu’il est contraint à se conformer docilement au tribunal. K. a mal au cœur en le regardant et décide de renvoyer Huld, mais celui-ci lui fait une démonstration de la domination qu’il exerce sur Block en le traitant comme un chien.

Ensuite, la rencontre de K. avec l’aumônier semble à mi-chemin entre le rêve et la réalité : dès qu’il rencontre l’abbé, qui a été missionné pour lui parler, il oublie le client italien à qui il avait donné rendez-vous.

La parabole de la Loi sert à donner un aperçu de la situation de K., en ce qu’elle regroupe les thèmes de l’oppression par la bureaucratie, de l’obéissance et de la distraction. Après s’être vu interdire l’entrée de la Loi, l’homme obéit au gardien qui lui propose de s’asseoir sur le tabouret. Il ne sait pas pourquoi il n’a pas le droit d’entrer, mais il attend quand même, tout concentré qu’il est sur l’ordre qui lui a été donné. Ce n’est qu’à la fin de sa vie que le garde lui annonce que la porte a été construite spécialement pour lui et qu’il est trop tard pour qu’il la franchisse.

La situation de K. ressemble à celle de l’homme de la parabole en ce que tous deux ignorent ce qui leur est reproché, de sorte qu’ils demeurent dans un état de confusion et de distraction permanent qui les empêche de passer à autre chose et d’avancer. La parabole, et le Procès lui-même, sont deux allégories de la futilité de l’existence. Les deux hommes passent leur vie à attendre des nouvelles de leur situation, bernés par une promesse qui ne sera jamais tenue.

Kafka a écrit le dernier chapitre du roman immédiatement après avoir écrit le premier. Il ne finit jamais le manuscrit, ce qui explique que le dernier chapitre ne mentionne aucune explication quant aux circonstances qui ont conduit à l’exécution de K. Il est étonnant que K. ne soit pas particulièrement surpris lorsque ses deux bourreaux viennent le chercher. Il envisage rapidement de se battre une dernière fois, mais il est épuisé et découragé par sa bataille judiciaire. Il finit donc par obéir et suivre les deux hommes jusqu’à la carrière où il sera exécuté.

Durant tout le roman, K. a cherché à obtenir de l’aide de la part d’autres personnes, et a été sans cesse déçu. Ce schéma se répète une dernière fois à la fin du livre lorsqu’il aperçoit une silhouette à la fenêtre d’une maison surplombant la carrière. Il espère brièvement qu’elle puisse le sauver, mais rien ne se passe. K. réfléchit au fait qu’il mourra sans savoir quel crime lui a été reproché ni rencontrer un magistrat haut-placé. Le fait que K. soit exécuté sans savoir pourquoi résume l’absurdité de sa situation et surtout l’inéluctabilité de sa situation. Il n’a pas eu besoin de commettre un crime pour être coupable : il aura suffi de l’accuser de l’avoir fait.

Kafka conclut le roman par une description concise et impitoyable du couteau de boucher utilisé pour tuer K. Il compare sa mise à mort à celle d’un chien, laissant entendre que K. ne vaut pas plus qu’un animal. Le narrateur conclut en disant que K. continuera à avoir honte même après sa mort, même s’il n’a jamais rien fait de mal.

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