Le Procès

Le Procès Résumé et Analyse

Le narrateur indique que K. avait pour habitude de quitter son bureau à vingt-et-une heures, d’aller se promener seul ou avec des amis, puis de s'asseoir dans une auberge avec d’autres hommes jusqu’à vingt-trois heures. Une fois par semaine, il rendait visite à Elisa, une jeune femme qui travaillait la nuit dans un bar à vins et le jour depuis son lit. Le jour de son arrestation, il travaille dur et beaucoup de personnes lui souhaitent son anniversaire. Espérant mettre de l’ordre chez Mme Grubach, il rentre directement chez lui et la trouve en train de repriser des bas. Il mentionne l’incident qui a eu lieu le matin même et remarque qu’elle a l’air surprise qu’il en parle. Elle lui dit de ne pas le prendre trop à cœur car c’est son bonheur qui est en jeu, et ajoute qu’elle a entendu les gardes parler et que l’arrestation ne semble pas si grave. Elle estime que l’arrestation ressemble à “ quelque chose de très savant qu'[elle] ne peut pas comprendre, mais qu'on n'a pas à comprendre ”. K. lui répond qu’en effet, ce n’est vraiment pas grand chose. Il lui présente ses excuses pour les événements de la matinée et dit qu’il aurait dû réagir différemment. Il lui propose de se serrer la main pour conclure la conversation : Mme Grubach se lève et lui répète, la gorge nouée, de ne pas prendre tout cela trop au sérieux, mais elle ne saisit pas sa main.

K. abandonne l’idée d’obtenir l’assentiment de Mme Grubach et lui demande si Mlle Bürstein est rentrée car il souhaite s’excuser auprès d’elle. Mme Grubach lui répond qu’elle a passé la journée dehors et que sa chambre est de nouveau en ordre, de sorte qu’elle ne saura pas que la pièce a été utilisée comme salle d’interrogatoire le matin-même. Mme Grubach ajoute qu’elle a déjà vu Mlle Bürstein avec plusieurs hommes différents dans des rues isolées et que sa vertu est sans doute douteuse. Cela met K. en colère car il sait que rien de tout cela n’est vrai. Il finit par rentrer dans sa chambre en claquant la porte et se moque de l’obsession qu’a la logeuse de faire de la pension un endroit pur et respectable. Il s’allume un cigare en attendant Mlle Bürstein.

Celle-ci rentre vers minuit et invite K. à discuter dans sa chambre pour ne réveiller personne. Il admet que des personnes sont entrées dans la pièce et lui présente ses excuses, tout en ne souhaitant pas lui divulguer toute l’affaire. Mlle Bürstein remarque que les photos accrochées au mur étaient de travers et K. admet que des enquêteurs sont venus. D’abord surprise, elle lui dit ensuite qu’elle pourrait l’aider puisqu’elle a prévu de commencer un travail de secrétaire juridique le mois prochain. Comme K. n’a pas beaucoup de détails à lui donner sur son dossier, il craint qu’elle ne le croie pas. Il décide de mimer la scène pour mieux la lui montrer et, pleinement impliqué dans son rôle, crie même son propre nom.

Alors que Mlle Bürstein lui dit de faire moins de bruit, quelqu’un toque à la porte. Agacée, elle lui dit que cela doit être le neveu de Mme Grubach, un capitaine, qui dort dans le salon et doit pouvoir les entendre. Mlle Bürstein dit à K. de rentrer dans sa chambre car cela fait plus d’une demi-heure qu’il est dans la sienne. Sur le pas de la porte, K. l’embrasse, d’abord sur la bouche, puis sur tout le visage et dans le cou, “ comme un animal assoiffé qui se jette à coups de langue sur la source qu’il a fini par découvrir ”. En allant se coucher, K. se dit qu’il est satisfait de la manière dont il s’est comporté mais qu’il redoute ce que le neveu de Mme Grubach pourrait dire à sa tante sur Mlle Bürstein.

Le lendemain, K. reçoit un coup de téléphone qui lui apprend qu’une audience est prévue le dimanche prochain et qu’il devrait s’habituer à ce que de courtes audiences se succèdent rapidement. Son interlocuteur lui donne une adresse qui se trouve dans un faubourg populaire dans lequel K. ne s’est jamais rendu. K. raccroche, bien résolu à faire en sorte que cette première audience soit aussi la dernière. Le dimanche matin, sur le chemin du tribunal, il aperçoit Rabensteiner, Kullisch et Kaminer. Il arrive dans un quartier résidentiel pauvre où les immeubles gris se succèdent et se ressemblent. Un peu énervé de n’avoir pas reçu plus d’indications sur l’endroit où l’audience se tiendrait, il toque à la porte de plusieurs appartements et dit chercher un charpentier appelé Lanz, pour pouvoir voir si la salle d’audience se situe dans l’un de ces logements. Une femme finit par lui dire répondre positivement et l’invite à entrer en précisant qu’elle doit vite refermer la porte après lui car personne d’autre ne doit entrer.

La salle d’audience est petite, remplie de meubles et de silhouettes vêtues de larges manteaux noirs qui lui tournent le dos. Dans les espaces poussiéreux et enfumés qui se trouvent à gauche et à droite de la salle, des gens marmonnent. K. est conduit à un bureau où rigole un petit homme obèse, qui lui dit qu’il aurait dû être là il y a une heure et cinq minutes. K. lui répond qu’il est certes en retard mais que le plus important est qu’il soit là maintenant. La partie droite de la pièce applaudit copieusement, tandis que seuls des applaudissements isolés lui parviennent du côté droit. K. se demande ce qu’il pourrait bien faire pour les rallier à sa cause.

Le juge fait avancer K. sur l’estrade, examine un petit carnet et demande à K. s’il est bien peintre et décorateur, ce à quoi l’accusé répond qu'il est comptable senior dans une grande banque. Des rires se font entendre à droite. K. dit au juge d'instruction que cette fausse information est bien représentative de toute cette affaire, qu’il qualifie de gâchis : les spectateurs restent silencieux. K. saisit le livre du juge avec deux doigts puis le laisse tomber sur la table pour humilier le juge, qui le ramasse et continue à le lire. K. explique ensuite à l'assemblée ce qu'il s'est passé lors de son arrestation, se plaint de la gêne occasionnée et décrit les mauvais traitements subis.

Le magistrat semble saluer quelqu'un dans l’auditoire et K. suppose qu'il fait signe à la foule de réagir à la scène. K. affirme devant tout le monde qu'il ne fait aucun doute qu'il y a une grande machination derrière tout cela. L'attention de K. et de la foule est ensuite attirée par un homme qui hurle dans un coin de la pièce en étreignant une femme. K. descend de la scène et se retrouve nez à nez avec la foule : il remarque alors qu’elle est principalement composée d’hommes âgés qui portent des badges qui semblent indiquer qu’ils appartiennent à un camp ou à l’autre. K. s’aperçoit que le juge porte le même badge et s’écrie alors qu’ils sont les mêmes fonctionnaires que ceux qu’il vient d’invectiver, ajoutant qu’ils ont tous fait semblant d’être divisés en deux camps pour le tester. Il ramasse son chapeau et se dirige vers la sortie en silence.

K. constate que le juge a été plus rapide que lui et est déjà devant la porte. Il lui indique qu’il vient de renoncer aux bénéfices que l’audience aurait pu procurer à un homme dans sa situation. K. ouvre la porte et se précipite dans l'escalier. Derrière lui, il entend la foule s’agiter et murmurer, comme le feraient des jeunes étudiants agités.

Analyse

Les thèmes de l’autorité, de l’obéissance et de la futilité se retrouvent une fois de plus ici lors de la conversation entre K. et Mme Grubach. Ayant appris que son arrestation n’entraînera pas forcément son incarcération, K. dit bien promptement que tout cela n’est “rien du tout”. Sa légèreté est vite sapée par l’attitude de Mme Grubach qui tient à ce qu’il s’occupe sérieusement de son dossier. Contrairement à K., elle montre une certaine déférence envers les figures d’autorité que sont les gardes.

Bien que Mme Grubach ne puisse pas connaître la nature des crimes reprochés à K., elle suppose que c’est parce qu’elle n’a pas bien compris ce dont il s’agissait, et considère que le langage cryptique employé par les gardes est dû à la nature “savante” de l’affaire. Elle tend naturellement à accepter l’arrestation et suppose que ses tenants et aboutissants sont tout simplement hors de sa portée. C’est ce qui permettrait au tribunal d’asseoir son autorité. K. est frustré de ne pas réussir à la convaincre que les accusations ne sont pas sérieuses, et il l’est encore plus lorsque sa logeuse suspecte Mlle Grubach d’être la maîtresse de plusieurs hommes en même temps, ce qui ne serait pas très respectable. La futilité de cette conversation l’agace tant qu’il finit par rentrer dans sa chambre en claquant la porte.

Durant la conversation de K. avec Mlle Bürstner, Kafka introduit le thème de la luxure. Bien que K. lui ait affirmé à plusieurs reprises qu’il souhaitait seulement lui parler, il la surprend en l’embrassant plusieurs fois sur le visage et dans le cou. Il ne semble pas remarquer que Mlle Bürstner n’est pas sensible à ses avances et rentre dans sa chambre satisfait de la manière dont il s’est comporté. Sa satisfaction n’est entachée que par le fait que le neveu de Mme Grubach ira sûrement se plaindre auprès de sa tante, ce qui dégraderait un peu plus à ses yeux la réputation de Mlle Bürstner.

K. apprend au téléphone que son procès commencera dès dimanche et consistera en une rapide succession de courtes audiences. Il continue à faire comme si rien de tout cela n’était grave et espère se débarrasser rapidement de ce problème. Kafka continue à faire de la vie de K. un mélange de rêve et de réalité puisque la salle d’audience est située au grenier d’un immeuble délabré d’un quartier pauvre. Ce choix est ironique puisque l’on se serait attendu à ce que le tribunal se trouve dans un bâtiment prestigieux.

Dans la salle enfumée et exiguë, les ambitions de K. sont mises à mal par plusieurs distractions. Il tente d’impressionner la foule avant de réaliser qu’elle n’est composée que de fonctionnaires du tribunal qui font semblant d’être des membres du public divisés en deux camps. Son discours est ensuite interrompu par un homme - qui s'avérera par la suite être un étudiant en droit - qui crie après avoir tenté de convoler avec la laveuse qui a fait entrer K. dans le tribunal. Le juge réprimande K. et lui reproche d’avoir perdu le bénéfice de l’audience, alors même que cela est de la faute du public et qu’il n’y est pour rien.