Foucault a entretenu une relation personnelle et intellectuelle étroite avec le penseur français Gilles Deleuze. Foucault a écrit une préface à l'un des livres les plus importants de Deleuze, écrit avec Félix Guattari, intitulé Capitalisme et schizophrénie : l’anti-Oedipe. Foucault y salue l'ouvrage comme une “ Introduction à la vie non fasciste ”. Bien qu'il soit un penseur très différent de Foucault, Deleuze a également cherché à identifier les moyens par lesquels les corps peuvent récupérer les plaisirs, les sentiments, les pensées et les énergies qui ont été accaparés par les régimes de pouvoir. Foucault et Deleuze ont tous deux participé activement au soulèvement étudiant de mai 1968.
En 1992, Deleuze a écrit un court essai intitulé “ Post-scriptum sur les sociétés de contrôle ”, dans lequel il présente une vision de la société moderne qui renvoie à la conception du contrôle social dans la pensée de Foucault. Deleuze souligne la façon dont les institutions entreprennent constamment des “réformes” au nom de l'efficacité, afin de contrôler les individus mais aussi d’entretenir une certaine confusion. Comme Foucault, Deleuze reconnaît que le pouvoir politique ne peut être compris uniquement en termes de relations verticales ou fixes. Il cherche à identifier les formes de contrôle plus diffuses, qui émanent des individus eux-mêmes, et qui forment une “société de contrôle”. Deleuze suggère que le sujet contemporain est mieux compris non pas comme un “ individu ” conscient et actif doté d'un pouvoir d'action, mais plutôt comme un “ dividu ”, un agglomérat de données, de compétences professionnelles et de qualifications académiques. Le sujet dividuel moderne peut être contrôlé efficacement parce que chacun de ses éléments appartient à une institution – la banque qui contrôle ses comptes, l'université qui lui confère son diplôme, etc...
Il est intéressant d’imaginer le contenu des volumes de l’Histoire de la sexualité que Foucault aurait écrits s’il n’était pas mort. Comment aurait-il interprété la montée en puissance des réseaux sociaux et les possibilités offertes par les plateformes numériques en termes de sexualité ? Comment Foucault comprendrait-il les tendances contemporaines de la surveillance en ligne ? De telles questions nous incitent à réfléchir à la pertinence actuelle du vocabulaire critique dont Foucault nous a dotés, mais interrogent aussi les limites de la conception foucaldienne du pouvoir.