Longtemps nous aurions supporté, et nous subirions aujourd'hui encore, un régime victorien. L'impériale bégueule figurerait au blason de notre sexualité, retenue, muette, hypocrite.
C'est par cette citation que Foucault commence La v*Volonté de savoir. Ces deux phrases résument l'hypothèse répressive, qui affirme que la sexualité est réprimée dans la société moderne. Foucault essaie ici de rendre l'hypothèse répressive à la fois familière et ridicule.
Ce qui est propre aux sociétés modernes, ce n'est pas qu'elles aient voué le sexe à rester dans l'ombre, c'est qu'elles se soient vouées à en parler toujours, en le faisant valoir comme le secret.
Foucault renverse l'hypothèse répressive : la sexualité n’est pas bâillonnée dans la société moderne, elle constitue au contraire un discours omniprésent. Le discours sur le sexe a fait de la sexualité notre identité fondamentale.
Le XIXe siècle et le nôtre ont été plutôt l'âge de la multiplication : une dispersion des sexualités, un renforcement de leurs formes disparates, une implantation multiple des « perversions ». Notre époque a été initiatrice d'hétérogénéités sexuelles.
Dans cette citation, Foucault développe ce qu'il appelle “ l'incitation permanente au discours ” sur le sexe, depuis la fin du XVIIème siècle jusqu’à aujourd'hui. Cette incitation concerne de nombreuses formes de discours institutionnels.
Et, au lieu de faire le compte des erreurs, des naïvetés, des moralismes qui ont peuplé au XIXe siècle les discours de vérité sur le sexe, il vaudrait mieux repérer les procédés par lesquels cette volonté de savoir relative au sexe, qui caractérise l'Occident moderne, a fait fonctionner les rituels de l'aveu dans les schémas de la régulante scientifique : comment est-on parvenu à constituer cette immense et traditionnelle extorsion d'aveu sexuel dans des formes scientifiques ?
Cette citation résume les enjeux de la scientia sexualis, discours qui tente de connaître le sexe avec une objectivité scientifique. Foucault affirme que les sciences de la sexualité du XIXème siècle n’étaient pas guidées par une moralité oppressive. C'est une force scientifique plus que morale qui façonne la recherche sur le sexe. Foucault s’intéresse ainsi à la manière dont la pratique de la confession dans le catholicisme a influencé les approches scientifiques de la sexualité au XIXème siècle.
Il a été placé, voici plusieurs centaines d'années, au centre d'une formidable pétition de savoir. Pétition double, car nous sommes astreints à savoir ce qu'il en est de lui, tandis qu'il est soupçonné, lui, de savoir ce qu'il en est de nous.
La double demande de connaissances sur le sexe met en évidence la dynamique du pouvoir au cœur de la sexualité moderne. Elle constitue un concept central de la quatrième partie. La demande de savoir est décrite comme double parce que nous croyons simultanément que nous devons découvrir la vérité sur notre sexualité, et que cette vérité nous dévoilera la vérité sur nous-mêmes.
Le sexe, raison de tout.
Formulée de manière quelque peu ironique dans l'introduction de la quatrième partie, cette affirmation résume la manière dont la société moderne a traité la sexualité comme la réponse ou la cause de tout phénomène social. Aujourd'hui encore, nous attribuons souvent des motivations sexuelles à un comportement humain apparemment non sexuel, tout en conférant une grande importance à l'influence des expériences sexuelles sur notre développement en tant qu'êtres humains.
Le pouvoir est partout ; ce n'est pas qu'il englobe tout, c'est qu'il vient de partout.
Cette citation est tirée du chapitre sur la méthode dans la quatrième partie. C’est l'une des citations les plus célèbres de Foucault. Foucault explique ici que le pouvoir est partout non pas parce qu'il est écrasant, mais parce qu'il peut être exercé de tous les côtés, par toutes et tous, et dans toutes les directions.
Il s'agit en somme de s'orienter vers une conception du pouvoir qui, au privilège de la loi,substitue le point de vue de l'objectif, au privilège de l'interdit le point de vue de l'efficacité tactique, au privilège de la souveraineté, l'analyse d'un champ multiple et mobile de rapports de force où se produisent des effets globaux, mais jamais totalement stables, de domination.
Foucault décrit ici le changement de la conception du pouvoir entre sociétés pré-modernes et sociétés modernes. Dans les sociétés pré-modernes, le pouvoir est détenu par une personne, le souverain, qui l’exerce de manière unilatérale et verticale sur ses sujets. La loi est l’expression de la volonté du souverain. Dans la société moderne, le pouvoir n’est plus concentré entre les mains d’une seule personne. Il émane de toustes et s’exerce au travers de tactiques complexes et plus douces de contrôle.
Le sexe n'est pas cette partie du corps que la bourgeoisie a dû disqualifier ou annuler pour mettre au travail ceux qu'elle dominait Il est cet élément d'elle-même qui l'a, plus que tout autre, inquiétée, préoccupée, (...) Il faut plutôt la voir s'employer, à partir du milieu du XVIIIe siècle, à se donner une sexualité et à se constituer à partir d'elle un corps spécifique, un corps « de classe » avec une santé, une hygiène, une descendance, une race : autosexualisation de son corps, incarnation du sexe dans son corps propre, endogamie du sexe et du corps.
Dans cette citation tirée du chapitre 3 de la quatrième partie, Foucault affirme que la bourgeoisie a utilisé la sexualité comme un analogue du sang aristocratique afin de maintenir son statut et sa domination.
C'est sur la vie maintenant et tout au long de son déroulement que le pouvoir établit ses prises ; la mort en est la limite, le moment qui lui échappe ; elle devient le point le plus secret de l'existence, le plus « privé ».
Cette citation, que l'on trouve dans le dernier chapitre de Foucault, articule le concept de bio-pouvoir avec les anciens régimes de contrôle social. Dans un régime bio-politique, le pouvoir s'exerce au travers de stratégies de contrôle de la vie, comme la régulation de la reproduction ou la promotion de la santé publique. Il s'agit là d'un changement important par rapport aux formes prémodernes de gouvernement, dans lesquelles l'expression ultime du pouvoir politique est le droit de décider de la vie ou de la mort d’un individu.